THEASO
présente
Un paysage sur la tombe
de Fanny Mentré
Éditions Actes Sud Papiers
Le texte a obtenu l’Aide à la Création du Ministère de la Culture (mars 94) et a été sélectionné par le Centre Dramatique Régional de Poitou-Charentes pour participer à « Jeux d’écritures » en avril 93, à Poitiers (lecture dirigée par Stuart Seide)
Mise en scène de l’auteur, Création au festival d’Avignon « In », Juil 94
Programme France Culture/Théâtre des Halles, diffusion sur France-Culture
Reprise en mars / avril 96 au Théâtre Le Volcan, Le Havre (8 et 9 mars) et au Théâtre de la Bastille, Paris (19/03 au 14/04)
LA PIECE
Un lieu. Un paysage. Indéfinissable. Prison ou infini ou désert. Parce qu’il reflète le tourbillon des dislocations psychologiques des personnages. Les mots, sans fioritures, vont à l’essentiel. L’écriture fluide ruisselle vers des cascades périlleuses. Quatre actes pour relater la naissance , l’enfance-adolescence, l’adulte, la vieillesse-mort.
Fanny Mentré est inscrite dans la mouvance de ces auteurs d’aujourd’hui qui libèrent un regard neuf, une utopie désenchantée, brisée. Les personnages de la pièce de Fanny Mentré sont encore plus seuls d’être ensemble. L’état de solitude en est alors amplifié. Cela nous interpelle dans le cadre de nos objectifs qui nous entraînent à microscoper les moindres recoins du comportement humain.
Qui, dans le public, n’éprouve pas cet isolement au sein de la masse?
Le texte de Fanny Mentré, simple et drôle, ouvre les portes secrètes d’un univers où tout paraît interchangeable puisqu’il est vrai que les personnages sont en quête de qu’ils pourraient être. On peut déceler dans le texte des arguments, des indications de temps, de couleurs… un paysage intérieur. On est embarqué dans un délire organisé, à la découverte des individus avant leur naissance et les accompagnant au-delà de leur propre mort. C’est avec un style très épuré et faussement lisse que Fanny Mentré nous interroge et nous invite à douter de la réalité. À nous perdre dans le labyrinthe paradoxal des vérités apparentes. C’est ce qu’expérimentent les personnages de cette pièce. Nous retrouvons là une des voies qui motive notre démarche.
L’AUTEUR
• Ancienne élève du Conservatoire d’Art Dramatique, Fanny Mentré entre en écriture en 1994 avec Un Paysage sur la Tombe, un texte publié chez Acte Sud Papiers qu’elle met elle-même en scène au Festival d’Avignon de la même année
•Plusieurs de ses textes sont ensuite créés par Alain Milianti au Havre: Chabada(bada), Le festin où s’ouvrent les coeurs et le festin pendant la peste.
• avec Thierry Collet à Sartrouville: Maître Zaccharius, d’après Jules Verne, un texte destiné au jeune public.
• Deux autres de ses pièces Le dernier vol de la cigogne et Histoire de Petit Bonhomme par lui-même ont obtenu l’Aide à la création du ministère de la Culture, comme Lisa 1 et 2 qui fut écrite en résidence à la Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon.
A PROPOS DE LA REALISATION
« Un mur c’est en haut et c’est en bas. C’est près des gens, c’est palpable et en même temps du haut de ses quatre faces ça s’offre un horizon du tonnerre. Les hommes s’appuient dessus et les oiseaux s’y reposent. »
Une des phrases du Paysage sur la Tombe qui m’a interpellé. Sans cesse, je me suis senti confronté à ce mur qui n’existe que dans l’imaginaire des personnages, qui les enferme, les limite mais aussi peut être escaladé par la force de la pensée et devenir un plongeoir vers l’espace-temps.
Il fallait des comédiens prêts à franchir des frontières, à libérer des pulsions proches de la folie, à prendre le risque d’être confrontés au désespoir et à la proximité de la mort. Une première distribution n’avait pas permis à ces solitudes d’aboutir à une cohésion dramaturgiquement efficace. Et puis, les expériences de rencontres ont engendré une nouvelle équipe dont les sensibilités paraissent compatibles et suffisamment en harmonie pour aller au- devant des tensions de cette histoire aussi banale qu’exceptionnelle.
J’ai un goût naturellement prononcé pour l’affrontement de personnages en déséquilibre et en danger parce que je crois fortement que leur fiction va bien moins loin que la réalité. Pour autant, je ne suis pas un pessimiste torturé par un flux d’angoisses métaphysiques ! Bien au contraire… il faut, je crois, beaucoup d’optimisme et d’humour pour que le discours de l’auteur ne soit pas trahi.
Et puis aussi, il faut l’avouer, il y a quelques symboles sous-jacents qui m’excitent infiniment. Ainsi, une paire de chaussures extravagante joue un rôle important. Le psychanalyste Samuel Lepastier prétend «qu’il n’y a pas plus féminin, plus excitant qu’un escarpin. C’est un véritable piège à hommes, un objet de désir. Le talon aiguille a toujours été un apanage féminin, symbole d’érotisme et de pouvoir. Dans mon jargon, on dit d’ailleurs qu’il représente le pénis manquant de la femme, quand bien même il reste le symbole même de la féminité. Tout cela est finalement très contradictoire…»
Un des personnages, celui qui se retrouvera dans la tombe, se nomme Léonard. Quand sorcières et sorciers se rendent au sabbat, ils baisent les fesses de Maître Léonard, démon du premier ordre, chef des démons subalternes, inspecteur général de la sorcellerie, de la magie noire et des sorciers. Il est taciturne et mélancolique, mais dans toutes les assemblées diaboliques où il est obligé de figurer, il se montre avantageux et déploie une gravité superbe.
Comment résister à ces allusions-illusions ?
Jean Mars